top of page

PORTRAITS DE FLEURS

 

Laurent Dauptain est surtout connu et reconnu pour ses autoportraits, un sujet qu’il pratique depuis son adolescence et le poursuit au point d’être devenu obsessionnel. Si l’on considère que tout tableau, quel qu’en soit le sujet, est un autoportrait, chez Laurent Dauptain il incarne une identité marquée par le temps qui passe  laissant ses stigmates sur la toile comme autant de scarifications dues au vieillissement et aux aléas de la vie. Alors que par le passé les portraits comme les autoportraits se devaient d’être toujours d’un format plus petit que la réalité, ceux de Dauptain, souvent très frontaux, sortent du cadre conventionnel pour prendre des dimensions hors normes. Ainsi, ce n’est plus seulement le portrait à proprement parler que l’on regarde, dans sa ressemblance et sa psychologie interne, mais un tableau de portrait dans sa picturalité. Il en va de même pour ses bouquets de fleurs de très grand format dont l’échelle surprend le spectateur qui les perçoit non plus comme une nature morte édulcorée, ce qui est souvent le cas pour les tableaux de bouquets, mais comme un portrait de bouquet vivant, incarné par cette peinture enlevée et gestuelle très maîtrisée. C’est cette altérité du réel et de sa représentation dans sa dimension picturale que Laurent Dauptain nous donne à voir à travers une œuvre qui n’a cessé d’évoluer pour atteindre aujourd’hui cette maturité autonome si identifiable par sa liberté de la touche et son emploi de la couleur.

 

Jacques Godin

juillet 2021

 

UN PARADOXE

 

Paysage du portrait ? Portrait du paysage ? Grande interrogation pour laquelle la réponse est si simple.

C’est, en effet, sur cette dichotomie que Dauptain, avec l’endurance, l’assiduité, la technique et le métier qu’on lui connaît, mène et fait évoluer depuis plus de vingt ans son œuvre picturale.

Ce qui revient à dire, qu’en quelque sorte, il pratique le paradoxe de la double identité plastique. Ses autoportraits et ses paysages ne sont en rien étrangers les uns aux autres. Il s’agit de deux canaux distincts pour traduire un seul objet : L’identité totale de l’artiste.

Si ses autoportraits prennent acte de l’évolution physique de leur modèle, ils rendent aussi compte au quotidien de ses états d’âme, de ses joies ou de ses soucis, par le truchement des couleurs, des cadrages, de la touche.

En contrepartie, les paysages sont les témoins discrets et tout en nuances de la vie intérieure de l’artiste, une manière de journal de son rapport au monde qui l’environne, à son ressenti des situations et évènements qu’il vit ou qui accompagnent sa vie, même s’il est loin de les « représenter ».

Pas de frontières entre les deux genres picturaux, mais un cordon ombilical invisible qui leur permet d’émettre, chacun avec ses moyens, la complexe unité d’un homme qui ne s’exprime vraiment que par son art.

 

Jean-Pierre GHESQUIERE

Janvier 2013

 

 

 

 

 

« …..Son œuvre étonnante, figurative, met en exergue les problématiques de la représentation, qu’il s’agisse du paysage, de la figure humaine et surtout de soi-même. En effet, dès ses débuts il s’est attaché à un exercice délicat, celui de l’autoportrait. Cette recherche constante lui permet d’inventer des variations formelles où les traits sont le prétexte à des propositions picturales toujours renouvelées. Journal intime? Sans doute, mais aussi moyen de dépasser les barrières du particulier et de l’anecdotique.

 

Laurent Dauptain nous raconte alors le temps qui passe, mais transforme sa fuite en moments de peinture, c’est-à-dire en instants d’éternité. »

 

Philippe ANCELIN

Février 2013

 

 

 

 

 

LE MIROIR, LE REFLET ET LE REFLET HORS DU MIROIR

 

L’artiste doit vivre en osmose avec son temps. Ce précepte fréquemment appliqué fût même souvent prophétiquement devancé. Ainsi, dès le XIX° siècle quelques peintres utilisèrent la photographie comme support de mémoire ou références documentaires. Il n’est donc que normal, malgré que de nombreuses autres technologies se soient imposées depuis sa découverte, qu’on y recoure encore au XXI° siècle ou, entre autres, elle s’est numérisée.

Sans exclusive Dauptain en use depuis le tout début de son activité et le procédé lui agrée, en lui permettant de s’envisager (le mot pour lui n’est pas trop fort) sans subir la fatigante observation et surtout la relative incertitude du reflet dans le miroir, pour concevoir ses autoportraits.

Dans ce cas, le reflet est fixe mais dans l’esprit du peintre c’est là qu’il bouge le plus, là seulement qu’il peut appréhender son image à son rythme, et, puisqu’il s’agit de sa propre image, de réfléchir sur lui même son apparence et sur ce que lui renvoie le cliché de son caractère ou de particularités physiques. L’image fixe qui lui permet cette réflexion plus complète et calme sur lui-même, convient à libérer sa main de peintre vis à vis de ce qu’il perçoit, de ce qu’il imagine mais finalement réalise être lui.

La confrontation avec le rendu photographique n’est pas moindre que celle provoquée par le miroir. Au contraire puisqu’elle est fixe et accuse d’autant plus directement et mieux l’observateur, qu’il ne peut plus fuir devant la distance de son propre reflet, bien plus apte à lui échapper, à le tromper, que le directement accusateur cliché.

Une photo rend compte de la réalité d’un instant précis, quand le miroir ne renvoie que l’imprécise fugacité de son reflet. Mensonge ou déguisement de l’image du miroir, ou de l’eau qui s’y apparente et vérité de la technique qui propose, elle, une base solide à l’interprétation et une ouverture à sa liberté.

S’il est quelqu’un que le peintre ne peut que difficilement dominer c’est lui-même. La photographie lui restitue au moins une part de ce pouvoir, l’accessibilise en proposant à son regard un modèle passé à un stade rendu fatalement plus étranger par la distance créée, cernable et interprétable. Je serais tenté de dire, car ce me semble être le cas pour Dauptain : aux données analysables et retransmissibles dans l’œuvre.

Si la photographie se pose en interface pour témoigner d’un fait, le peintre s’affirme comme son reflet direct. La confrontation entre « lui « et « lui-même « par le truchement du cliché est un moyen que Dauptain a perçu comme le plus complet pour se retrouver en toute sa vérité humaine et spirituelle dans son œuvre. Pour exister réellement, l’œuvre a besoin que le rapport entre le sujet et les moyens picturaux mis à disposition pour sa réalisation soit les plus exacts et constants possibles. D’où la nécessité d’un point fixe entre la réalité observée et le regard que l’artiste porte sur lui-même, dans cet exercice de haute voltige à la fois intellectuel et pictural qu’est la pratique de l’autoportrait. Dans ce domaine Dauptain sait ou il va, parce qu’il analyse, ne serait-ce qu’intuitivement, toutes les étapes de son processus créatif. Il veut rendre non seulement ce qu’il voit mais l’au-delà de ce qu’il voit et restituer picturalement avec la plus implacable exactitude ce qu’il ressent, même si c’est contre l’idée qu’il pouvait se faire de lui-même.

Le seul but de Dauptain, sa quête : la vie. Pour lui, elle seule compte. Parce qu’il se sait et constate changeant, que depuis toujours, il s’est constitué volontairement et consciemment observateur fidèle de ce fait inéluctable, mais d’autant moins acceptable aux âmes faibles qui s’égarent sur le chemin tortueux de l’introspection, sans retour en arrière ni sentiment que nous qualifierons de réévaluateurs. La vérité est la plus difficile des vertus tant à visualiser qu’à dire. Sur ce délicat sujet, cet artiste est, au-delà de son titre de peintre, un exemple, car il sait s’accepter et se livrer dans ce qu’il a de plus secret et de plus réservé. Au spectateur de savoir le lire dans ses œuvres !

Dauptain est un homme très conscient qui se dit et redit, se livre sans cesse par et dans son œuvre, sans la moindre apparence de prostitution à l’art qui est le sien : celui de la soumission à la ressemblance tant physique que morale, et de sa propre adhésion à la sienne réalisée et transmise dans chacun de ses autoportraits.

 

Jean-Pierre GHESQUIÈRE

Octobre 2011

 

 

 

 

Laurent Dauptain c'est un regard, une manière personnelle d'aborder portraits ou rues désertes. Sans s'attarder à la minutie du détail, il s'attache à recréer une expression, une atmosphère. Et si les passants sont absents de la ville, l'humain y demeure en filigrane grâce aux immeubles qui bordent les trottoirs.

Entre ombre et lumière il nous conduit de Manhattan à Brooklyn et l'on éprouve un sentiment de solitude devant ces bâtiments impersonnels qui semblent vouloir garder jalousement leurs secrets. Laurent Dauptain aime une pâte nourrie, une construction solide, il joue parfaitement  avec les gris et les noirs qu'éclairent quelques réverbères rougeoyants dans des œuvres souvent réalisées en nocturne. Certaines œuvres apparaissent presque linéaires et éclairées par endroit de blancs.

Laurent Dauptain nous conte la vie silencieuse en ville qui, malgré la densité de population, peut aussi être solitaire, livrée à elle-même. Un pick-up stationné vient cependant rappeler que l'être humain est bien là. L'on connait aussi cet artiste comme excellent portraitiste, il a réalisé, entre autres, de nombreux autoportraits sans complaisance.

 

Nicole LAMOTHE

2012

 

 

 

 

 

 

 

bottom of page